Volume 35 numéro 28
23 avril
2001


 


ARCHIVES

On veut bâtir un hôpital au Pavillon principal!

La construction des pavillons de l’UdeM: un vrai roman

Le Pavillon principal de l’Université de Montréal en construction, en 1931, selon les plans d’Ernest Cormier. On a longtemps pensé y bâtir un hôpital…

L’histoire de la construction du Pavillon principal tient du roman. L’immeuble, dont l’édification a commencé en 1924 et qui devait être la grande fierté de l’élite montréalaise, mettra près de 25 ans à s’ériger. Ce qu’on sait moins, c’est que ce pavillon a failli abriter un hôpital de 480 lits. Les professeurs de la Faculté de médecine favorisaient ce projet en s’inspirant des grandes écoles américaines, qui disposaient d’hôpitaux en milieu universitaire.

Jusqu’en 1953, la Faculté de médecine a poursuivi des négociations avec le gouvernement provincial pour faire débloquer le projet. Mais le premier ministre Maurice Duplessis, à l’automne de 1957, lui retire son appui. L’arrivée de Jean Lesage au gouvernement ravive l’espoir chez les partisans du projet. En juin 1963, le doyen Lucien L. Coutu propose la construction d’un hôpital de 14 étages au coût de 42 M$. Il va jusqu’à annoncer que la première pelletée de terre se fera en mai 1964 et que l’établissement ouvrira ses portes en 1967.

Il faut attendre l’ouverture de l’hôpital Sainte-Justine pour que le premier ministre Lesage, en août 1965, mette définitivement fin au projet. La Faculté de médecine s’estime gagnante puisqu’elle négocie des affiliations avec les hôpitaux universitaires de la région de Montréal, répondant à ses besoins en enseignement et en recherche.
Le projet d’un hôpital sur la montagne est finalement abandonné après une saga de 25 ans.


Le grand chantier

Les années 60 seront, dans l’histoire de l’Université de Montréal, une période de changements majeurs. Sur le plan administratif, l’Université devient laïque par sa troisième charte, en 1967. En 1965, elle nomme son premier recteur laïque, Roger Gaudry. La population étudiante passe de 600 étudiants en 1942 à 9000 (dont 1500 à l’éducation permanente) en 1963. Le personnel enseignant passe quant à lui, pendant la même période, d’à peu près 30 à 500 professeurs. Le personnel de soutien progresse dans le même ordre. Devant cette croissance, il faut bâtir.

Les projets sont tellement nombreux qu’on doit créer un comité de construction pour voir à la bonne marche du plan d’expansion. Des 33 pavillons que compte l’actuel campus, 10 sont construits au cours de cette période. C’est le cas des pavillons administratif, Maximilien-Caron, Lionel-Groulx, 3200 Jean-Brillant et Thérèse-Casgrain. La centrale thermique, le laboratoire René-J.-A.-Lévesque, le stade d’hiver et la Station de biologie des Laurentides voient aussi le jour, sans compter les nombreux ajouts à des pavillons existants, dont celui de la Faculté de médecine vétérinaire à Saint-Hyacinthe. Jean Gratton, ancien directeur du Service de l’équipement, raconte dans Le Quartier latin que «le campus entier avait été converti en chantier. L’immeuble principal était devenu inaccessible. Les automobiles devaient stationner à 200 ou 300 pieds des pavillons. On avait fait bâtir des plates-formes pour que les gens puissent se rendre au travail.»

En avril 1965, dans le communiqué annonçant l’inauguration des rampes mobiles, l’Université annonce que les 142 marches de bois qu’il fallait grimper pour se rendre sur le campus seront détruites. La capacité des rampes est de 16 000 personnes à l’heure. On promet un accès à l’Université «sans fatigue».


Centre social et résidences

Le campus compte plusieurs immeubles consacrés à la vie étudiante. En janvier 1956, le Centre d’habitation (la résidence A) est inauguré. C’est un bâtiment de six étages comptant 115 chambres. Aménagé avec un souci pratique, il prévoit au bout de chaque étage un salon réservé aux résidents. Un espace accueille les visiteurs au premier étage. Le règlement dit que «les dames et les demoiselles y seront admises le vendredi soir, de 8 h à 11 h, ainsi que le dimanche, de 3 h l’après-midi à 11 h du soir».

On mentionne que l’occupant de la chambre «doit faire son lit lui-même» et que, s’il fait la fête, «la porte principale de la résidence est fermée à 11 h du soir». Coût de location: 150 $ par semestre, soit 7,50 $ par semaine.

Le bâtiment de l’École Polytechnique est inauguré en mai 1956, un an avant le Centre social (rebaptisé, depuis, Pavillon J.-A.-DeSève). Ce dernier immeuble comprend une cafétéria de 725 places, une chapelle, une discothèque «bâtie selon toutes les lois de l’acoustique», un salon de barbier, une caisse populaire ainsi que les locaux de l’association étudiante (AGEUM). Le Centre social est relié par un tunnel au Centre d’habitation.


Les bâtiments modernes

Par la suite, d’autres constructions ont été érigées. L’École des Hautes Études Commerciales a été inaugurée en 1970. Une résidence supplémentaire a été construite en 1976. Le CEPSUM a été terminé pour les Jeux olympiques de Montréal. L’Observatoire du Mont-Mégantic a ouvert ses portes en 1978. Le Pavillon Liliane-de-Stewart a été construit en 1981. Terminée en 1987, la bibliothèque Samuel-Bronfman est un des projets de la Campagne des années 80, comme le Pavillon André-Ainsenstadt. Deux ans plus tard, le Pavillon Paul-G.-Desmarais ouvrait ses portes.

La superficie brute des bâtiments appartenant à l’Université de Montréal est de 564 122 m2. Les terrains, qui sont en grande partie la propriété de l’Université, de même que ceux qui sont loués totalisent environ 2000 ha.

Denis Plante
Archiviste
Http://www.Archiv.umontreal.ca


Sources:
• André Beaudouin, Inventaire physique 2000, Université de Montréal, Direction des immeubles/CCRT.
• Hélène-Andrée Bizier, L’Université de Montréal: la quête du savoir, Montréal, Libre-Expression, 1993.
• Denis Goulet, Histoire de la Faculté de médecine de l’Université de Montréal: 1843-1993, Montréal, VLB éditeur, 1993.
• Julie Sarrault, La mise en place des structures de la recherche universitaire à la Faculté des sciences de l’Université de Montréal (1920-1945), mémoire de maîtrise présenté au Département d’histoire de l’Université du Québec à Montréal en juin 2000.
Le Quartier latin.
L’Interdit, la revue des diplômés de l’Université de Montréal.


Toponymie des pavillons
L’Université a donné à plusieurs de ses pavillons le nom de gens qui ont marqué son développement, qu’il s’agisse de professeurs ou d’administrateurs: Maximilien Caron, Lionel Groulx, le frère Marie- Victorin, Jules Brunel, Paul Pirlot, Étienne Magnin, Andrien Robert, René J.-A. Lévesque et Louis-Colin; de donateurs: J.A. de Sève, Samuel Bronfman, Marguerite d’Youville, Liliane de Stewart, André Aisenstadt et Paul-G. Desmarais; ou d’autres personnalités: Thérèse Casgrain, Édouard Montpetit.

D.P.