Volume 35 numéro 24
19 mars
2001




COURRIER

Débat création-évolution: le mot du modérateur
Le nombre et la place des articles publiés à la suite du débat du 23 novembre dernier démontrent l’intérêt — ou le désintérêt, si je puis m’exprimer ainsi — suscité par ce dernier. J’ai d’abord cru qu’il était inutile de répondre à ces articles, mais je prends comme une invitation à le faire le fait que mon nom y a été mentionné à plusieurs reprises!

Le débat sur l’origine de la vie est une question très actuelle aux États-Unis. Des arrêts ont été prononcés en sa faveur dans plusieurs États américains de sorte que la thèse créationniste est maintenant enseignée dans ceux-ci. En tant qu’organisateur de ce débat, ma motivation était de favoriser le dialogue entre les tenants de chacune des deux thèses. Je penche effectivement en faveur de la thèse créationniste et, oui, je crois que Dieu est le créateur de toutes choses. Je crois aussi que Dieu est totalement libre et qu’il peut aussi avoir créé par le biais de l’évolution, quoique les arguments en faveur de cette thèse ne m’aient pas convaincu. Comme l’a si bien dit un professeur de biologie: «Pour la science, c’est le doute perpétuel!» Ceci constitue le moteur qui la fait avancer! Pardonnez-moi si je doute de l’évolution.

Je voudrais aussi préciser que la Faculté de théologie et le centre Benoît-Lacroix ne sont pour rien dans l’organisation du débat du 23 novembre dernier et que le GBU est bel et bien affilié à l’Université de Montréal en tant que regroupement étudiant reconnu par celle-ci.

Je voudrais encore préciser que le GBU n’endosse pas nécessairement tout ce qui a été mentionné durant le débat, autant au point de vue des arguments que sur le plan de la méthode employée au cours de cette soirée. Nous favorisons l’ouverture et le dialogue entre membres de différents arrière-plans en matière d’hypothèses à ce sujet.

En droit, une preuve de culpabilité doit toujours être suivie par la possibilité d’être contestée par la défense et c’est dans cette joute d’arguments que la vérité peut faire surface. Le débat se voulait justement une joute qui permettrait à chaque parti de faire valoir ses arguments et de répondre à ceux-ci. Le public a eu l’occasion unique de voir les deux thèses mises face à face. N’était-ce pas permettre une distance critique que d’écouter les arguments de chacun des représentants? N’était-ce pas une occasion d’entendre deux perspectives et d’éviter le piège tautologique? Pour ce qui est du débat, les commentaires que j’en ai reçus ont été partagés de part et d’autre de sorte que, d’une manière générale, l’exercice a été utile pour avancer la possibilité d’un dialogue.

À ce titre, aucune des deux thèses ne prétend à toutes les réponses. Chaque thèse produit plusieurs théories. Les scientifiques tentent d’expliquer par l’histoire l’origine du monde (au sens large l’infiniment petit et l’infiniment grand). Ensuite, un des buts du débat était de lever le voile religieux couvrant la thèse créationniste. L’approche créationniste est une approche historique de l’homme et du cosmos. L’affirmation que les changements climatiques sont responsables de la disparition d’espèces est reconnue par les deux thèses. Ce ne sont que les espèces les mieux pourvues pour survivre à ces changements qui sont demeurées. La dérive des continents fait aussi partie des sujets d’étude des créationnistes et plusieurs hypothèses sont émises.

La difficulté dans ce genre de débat, c’est que chacun cherche à le gagner. Ce qui, à mon sens, ne contribue en rien au dialogue, bien au contraire. Ceci étant dit, j’espère qu’il y aura d’autres débats de ce type. Que ceux-ci favoriseront davantage une ouverture de part et d’autre. Que chacun pourra plus librement démystifier son approche quant aux origines du monde. Épicure croyait que le monde était le seul fait du hasard. Einstein dira que «Dieu ne joue pas aux dés avec l’univers». Notre philosophie entre en jeu dans l’interprétation que nous faisons des phénomènes que nous observons. En confrontant nos idées avec d’autres visions du monde, nous pouvons enrichir notre connaissance du monde. La diversité est une source de richesse et faire taire les idées contribue à l’appauvrissement de la science.

Bertrand Blais
Étudiant en théologie