FORUM - 21 FÉVRIER 2000

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Un logiciel prometteur d'aide à la traduction

Le RALI a le vent dans les voiles.

Philippe Langlais, docteur en informatique, et Guy Lapalme, professeur au Département d'informatique et de recherche opérationnelle (à l'arrière-plan), ainsi que Sébastien Sauvé (au clavier), du RALI, ont donné un aperçu à Forum des possibilités du logiciel Transtype.

Comme beaucoup de francophones, l'informaticien Guy Lapalme sourit lorsqu'il lit des traductions ubuesques produites par ordinateur sur des emballages de produits de consommation. Depuis le temps qu'il travaille sur différents logiciels utilisés par les traducteurs dans le cadre du Laboratoire de recherche appliquée en linguistique informatique (RALI), il a compris que l'avenir n'était pas à la traduction automatisée, mais à l'aide à la traduction.

Le dernier-né du groupe de recherche s'appelle Transtype et répond à ce principe. Le texte à traduire apparaît dans la partie supérieure de l'écran; le traducteur tape son texte dans le bas. Le logiciel ne fait que des propositions de mots, selon la probabilité la plus vraisemblable. Si l'usager accepte la proposition, il appuie sur la touche Retour. Puis il continue son travail.

"La machine doit s'adapter à l'usager et non l'inverse", lance M. Lapalme. Dans le cas des traducteurs, il fallait trouver un logiciel capable de laisser une grande liberté d'action à la personne installée au clavier, tout en lui permettant de gagner du temps.

En observant des professionnels à l'oeuvre, l'équipe du RALI a calculé que le logiciel Transtype permettait de diminuer de 60% à 70% leur nombre de frappes. Bien que ce résultat soit encore préliminaire, il semble que les usagers se soient montrés plutôt satisfaits. "Les traducteurs restent maîtres de leurs traductions. Ils peuvent faire leur travail sans s'occuper des suggestions", explique Philippe Langlais, spécialisé dans les technologies de reconnaissance de la parole.

Ce qu'ils apprécient, c'est de pouvoir naviguer à volonté dans le texte, renchérit Sébastien Sauvé, qui vient d'obtenir son baccalauréat au Département d'informatique et de recherche opérationnelle et qui travaille au RALI à titre de technicien.

Un logiciel pratique
Là où le logiciel est indiscutablement pratique, c'est lorsqu'il transcrit automatiquement les chiffres et les noms propres. Les textes du Journal des débats de la Chambre des communes, par exemple, doivent être traduits durant la nuit afin d'être disponibles dès le lendemain dans les deux langues. Certaines erreurs dues à la fatigue peuvent se glisser lorsqu'il est trois heures du matin et qu'il faut épeler correctement plusieurs fois "Werner McWhinney" et recopier tel ou tel budget gouvernemental, signale M. Lapalme. "En transcrivant directement les noms et les données, le logiciel diminue le risque d'erreur."

La mise au point de Transtype, rendue possible grâce à une subvention stratégique du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, a été effectuée en collaboration avec la firme Machina Sapiens. Mais la commercialisation du logiciel n'est pas pour demain, car d'autres travaux de recherche et développement restent à faire.

20 000 requêtes par mois
Ce projet s'inscrit dans une série d'outils d'aide à la traduction du RALI, dirigé par Elliott Macklovitch, lui-même diplômé en langue anglaise. Le TransTalk effectue la transcription automatique d'une traduction dictée à partir d'un modèle probabiliste. Quant au TransSearch, c'est une des "vedettes" du Laboratoire. Ce programme permet de consulter des traductions en archives. L'usager a donc au bout des doigts le fruit des cogitations de ses collègues qui ont planché sur des expressions difficiles.

Comment, par exemple, traduire l'expression "tirer le diable par la queue"? Le logiciel nous donne quelques suggestions tirées d'une base comptant 50 millions de mots, notamment "continue to struggle", "tired to their dire economic straights" ou encore "beginning to go hungry".

Cette base de données accessible gratuitement sur Internet (www-rali.iro.umontreal.ca/TransSearch/) est ce que les spécialistes appellent un "concordancier bilingue". Il fonctionne de l'anglais vers le français et inversement. Son succès est mondial: on a noté une fréquence de plus de 20 000 requêtes par mois.

D'autres produits sont en voie d'être lancés sur le marché ou carrément commercialisés. C'est le cas de "¿Que", un système capable de reconnaître la langue des documents informatisés. "Le mot 'file', par exemple, signifie 'fichier' en anglais et complètement autre chose en français. Lorsque vous lancez une recherche dans Internet, il faut donc préciser dans quelle langue vous vous exprimez", dit M. Lapalme.

Le logiciel ¿Que a été mis au point par Michel Simard, aujourd'hui étudiant au doctorat. Il sait reconnaître un grand nombre de langues, dont le russe, le hongrois et le suédois.

Mathieu-Robert Sauvé


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