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Pas bête mais anxieux

Le Dr Chalifoux présente un traitement de l'anxiété de séparation pour le chien.

Comme le Dr Doolittle, André Chalifoux, médecin vétérinaire depuis plus de 30 ans, connaît et comprend bien les animaux. C'est son intérêt pour les bêtes et les sciences biologiques appliquées qui l'a conduit vers cette profession.

"Si vous ne réglez pas le problème de mon chien, je le fais euthanasier." C'est ainsi que 90% des personnes qui viennent consulter le Dr André Chalifoux, professeur à la Faculté de médecine vétérinaire à Saint-Hyacinthe, expriment leur découragement devant la conduite de leur pitou.

"Le chien a un comportement d'animal de meute. Autrement dit, il a besoin de compagnie. Mais les membres de la famille, qui correspondent à sa meute, lui imposent de longues heures de solitude lorsqu'ils vont au travail ou à l'école. Résultat? Certains chiens ressentent de l'anxiété et risquent de faire beaucoup de dégâts dans la maison, explique le Dr Chalifoux. Dans la grande majorité des cas, cette anxiété se manifeste par des aboiements persistants. D'autres chiens détruisent des objets ou encore ont des défécations inopportunes."

Selon ce spécialiste du traitement de l'anxiété de séparation chez le chien, la punition ne sert à rien puisqu'elle ne règle pas le problème de l'anxiété. Par ailleurs, le Dr Chalifoux révèle qu'aucune punition ne peut être efficace si elle est administrée dans un délai supérieur à une demi-seconde après la bêtise. "Lorsque la personne revient à la maison vers 18 heures et qu'elle constate des dommages, il est trop tard pour punir, estime le Dr Chalifoux, car le chien a commis son geste dans les minutes qui ont suivi le départ de son maître", assure-t-il.

Les causes de l'anxiété sont difficiles à établir, admet le Dr Chalifoux. Certains chiens peuvent être anxieux sans raison apparente, alors que d'autres, qui ont toujours eu de bons comportements, souffrent d'anxiété à la suite d'un changement d'horaire de travail de leur maître. Chose certaine, aucune race ni aucun sexe n'ont le monopole de l'anxiété animale, souligne le vétérinaire. À son avis, tout dépend de la relation du maître avec le chien. Le Dr Chalifoux sait de quoi il parle. À la clinique de la Faculté de médecine vétérinaire, il traite chaque année quelque 150 chiens anxieux.

Les chats sont par nature plus attachés à leur environnement qu'aux membres de la famille. Ils manifesteront du stress s'ils sont mis en pension ou lors d'un déménagement. En revanche, cet animal domestique n'éprouve pas d'anxiété de séparation lorsqu'il est laissé seul à la maison.

Les traitements de l'anxiété animale
Comment un vétérinaire peut-il soigner les troubles psychologiques d'un chien? A-t-il une approche psychanalytique freudienne ou lacanienne? Ni une ni l'autre, répond le Dr Chalifoux. Mais il doit tenter de savoir ce qui affecte le comportement de l'animal. C'est grâce à une série de questions sur les habitudes du propriétaire et le profil du chien que le vétérinaire arrive à mieux cerner le problème.

"Lorsqu'on traite un chien adulte pour de l'anxiété de séparation, comme pour tout problème de comportement, le programme est individualisé, car chaque animal progresse à son propre rythme. L'utilisation de la combinaison thérapeutique d'une période d'entraînement et d'un médicament anti-anxiété s'applique néanmoins à tous les cas, signale le Dr Chalifoux. La médication est administrée pendant les huit semaines du programme."

L'entraînement se compose d'une série d'exercices quotidiens effectués durant deux mois. Une première phase du programme s'inscrit dans un objectif de contre-conditionnement, explique le Dr Chalifoux. À cette étape, il s'agit d'inculquer à l'animal un comportement incompatible avec celui qu'il a. Par exemple, pour que le chien cesse de sauter sur les visiteurs, on lui apprend la commande "assis-reste", qui est inconciliable avec l'acte de sauter. Dans le cas des chiens anxieux, la commande "coucher-reste" les initie à la relaxation.

Le traitement de l'anxiété de séparation est caractérisé par une seconde phase: la désensibilisation du chien aux indices de prédépart. "Le chien fait la différence entre la semaine et la fin de semaine juste par les vêtements et les heures de sortie de son maître, fait remarquer le Dr Chalifoux. Les chiens sont très attentifs aux indices routiniers tels que prendre sa douche, s'habiller, manger, mettre son manteau, etc. Ils anticipent ainsi le départ de leur maître et cela exacerbe leur anxiété."

Les premiers jours de la thérapie consistent à accomplir ces actions mais à ne pas partir. Durant ces pratiques, le chien qui respecte la commande "coucher-reste" est alors récompensé. "Si l'on ne peut demeurer à la maison ou encore amener son chien au travail, il est préférable de prévoir une compagnie", souligne le vétérinaire.

Vient ensuite le moment des vrais départs. Au début, le Dr Chalifoux préconise des retours quasi immédiats, mais graduellement la période d'absence augmente. "Les progrès se font en dents de scie et ce ne sont pas tous les chiens qui répondent à cette désensibilisation, mentionne le spécialiste. En fait, il existe une relation directe entre la durée du problème et l'efficacité du traitement, d'où l'importance de consulter aussitôt que le chien adopte un mauvais comportement."

La prévention
Contrairement aux chats, qui par nature sont plus attachés à leur environnement qu'aux membres de la famille, les chiens peuvent éprouver un trop grand attachement à leur maître. C'est ce human animal bond, comme disent les Américains, qui a donné au chien le titre du meilleur ami de l'homme. Mais cette qualité peut se retourner contre lui. "Afin de prévenir les troubles de l'anxiété animale, il faut les habituer dès qu'ils sont chiots à ne pas être continuellement sur nos talons", avertit le Dr Chalifoux.

À son avis, la pratique des commandements de base, lesquels représentent une façon de leur apprendre qui est le maître, permet aussi d'éviter le développement de problèmes anxiogènes lors d'absences du propriétaire. Il existe une manière d'évaluer la période maximale de séparation que peut supporter un animal. On multiplie l'âge (en mois) du chiot par une heure, et l'on en ajoute une au total. Par exemple, un chien de quatre mois peut être laissé seul pendant cinq heures.

Dominique Nancy


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