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Allocution du recteur Robert Lacroix à l'Assemblée universitaire

Nous avons commencé à construire l'Université du 21e siècle; pour poursuivre, il nous faut l'aide du gouvernement et de la société.

En octobre 1998, il y a exactement un an, je présentais à la communauté universitaire un plan de relance de notre établissement qui visait à transformer graduellement la majorité de nos programmes d'études pour en accroître la qualité, la pertinence et l'ouverture. Je proposais que nous attachions davantage d'importance à la qualité de vie sur le campus, à l'accueil et à l'encadrement de nos étudiants, ainsi qu'à leur cheminement dans nos divers programmes.

Je soulignais que les grandes tendances dans l'évolution et le financement de la recherche universitaire, tout en nous interpellant, nous incitaient à innover dans la structuration de nos activités de recherche et à établir les partenariats et les synergies avec nos deux écoles affiliées pour assurer le leadership d'un complexe universitaire à nul autre pareil au Québec.

Il fallait, par ailleurs, simplifier, sans en diminuer la rigueur ni la crédibilité, le processus d'évaluation de nos unités d'enseignement et de recherche en l'orientant davantage vers la qualité, la pertinence et l'ouverture de nos programmes d'études. L'évaluation n'est pas requise seulement comme mécanisme d'imputabilité auprès de la société mais aussi comme moyen d'orienter les décisions de planification stratégique.

Le projet de relance de notre établissement devait aussi nous permettre de nous libérer rapidement du carcan financier dans lequel nous avait placés la réduction des subventions de fonctionnement que le gouvernement nous accorde traditionnellement. Il aurait été irresponsable de creuser encore davantage le gouffre financier dans lequel nous nous enfoncions. Nous voulions donc, par un contrôle serré des dépenses et une augmentation des revenus provenant, entre autres, d'une croissance planifiée de nos clientèles étudiantes, éliminer le plus rapidement possible notre déficit courant.

Nous savions enfin que, pendant trop longtemps, l'Université de Montréal avait fait beaucoup sans jamais le faire savoir. Il fallait que cela change. Nous devions mieux informer la société de ce que nous étions et surtout de ce que nous devenions. Dans les deux cas, cela ne pouvait que nous être favorable.

Pour amorcer cette grande relance, nous avions l'avantage unique de bénéficier d'un fonds de quelque 13 millions de dollars, constitué à même un congé de cotisation au fonds de retraite de l'ensemble de nos personnels. C'était un signe clair que la communauté universitaire pouvait se prendre en main et surmonter, en comptant sur ses propres moyens, la pire crise que le système universitaire québécois ait connue depuis la Révolution tranquille.

C'est avec une grande fierté que je peux vous annoncer que, grâce à l'implication remarquable de tous les membres de notre communauté, notre plan de relance offre, tout juste un an après sa mise en oeuvre, des garanties de succès qui dépassent nos espérances et qui confondront sûrement les sceptiques.

Sans entrer dans le détail, vous me permettrez de partager avec vous les composantes majeures de ce succès.

L'enseignement
À tous les cycles d'études et en formation continue, pas moins de 50 programmes ou modules ont été créés, modifiés ou amalgamés en fonction des critères de qualité, de pertinence et d'ouverture que nous avions établis dans le plan de relance. Parallèlement à cette initiative de fond, nous avons intensifié nos activités d'accueil, mis en place des points de service intégrés, introduit une carte d'identité étudiante, conçu un guichet étudiant interactif, accéléré le processus d'admission et d'inscription des étudiants, multiplié le nombre de bourses, renforcé le rôle du Bureau du recrutement et, enfin, organisé des activités de formation hors campus à Longueuil et à Laval. La promotion des programmes, nouveaux et anciens, a également fait l'objet d'efforts particuliers.

D'après les chiffres fournis à la CREPUQ le 22 septembre dernier par l'ensemble des universités, on assiste actuellement au Québec à une augmentation du nombre d'étudiants de 1,5%. Par comparaison, l'Université de Montréal connaît une augmentation de 2,5% de sa clientèle. Deux autres données sont encore plus significatives pour l'avenir. Il s'agit d'abord du nombre de nouveaux étudiants inscrits à plein temps au premier cycle. Pour l'ensemble des universités, la population de cette fraction de la clientèle étudiante a augmenté cet automne de 6,6%. Pour l'Université de Montréal, cette croissance se chiffre à 14%. De plus, alors que la masse de crédits de 1er cycle de l'ensemble des universités a augmenté de 3,7% à l'automne 1999, pour l'Université de Montréal cette augmentation s'est élevée à 7,9%.

Un tel accroissement de nos effec-tifs étudiants survient après six années de baisse des admissions et de contre-performance par rapport aux autres universités québécoises. C'est dire combien nous pouvons être fiers des résultats de cette première année de relance.

Si nous voulons que des résultats aussi concluants puissent être annoncés en octobre 2000, il faut que durant la présente année nous poursuivions nos efforts. Les moyens nous sont connus, il ne s'agit que de continuer à bien les appliquer: transformation des programmes d'études dans toutes les facultés, création de programmes novateurs conformes à la spécificité de notre établissement, développement accru des activités de formation hors campus, amélioration de l'encadrement de nos étudiants, généralisation dans les unités des mesures qui augmentent la persévérance aux études, implantation d'un guichet étudiant qui permettra des processus simplifiés et conviviaux de gestion académique. L'Université réinvestit aussi dans le soutien pédagogique aux professeurs et aux chargés de cours par le lancement des activités du Centre d'études et de formation en enseignement supérieur, qui aidera également les unités dans le suivi de l'évaluation de l'enseignement. De même, le financement du projet Soutien à l'utilisation d'Internet et des technologies de l'enseignement sera assuré par le Fonds de relance. Il faut en outre que l'amélioration de la qualité de vie sur le campus s'accélère dans tous les aspects de la vie universitaire. Enfin, les efforts consentis jusqu'à présent pour le recrutement de nouveaux étudiants restent nécessaires si l'on veut maintenir la remarquable hausse des inscriptions à l'Université de Montréal.

La recherche
En ce qui regarde nos activités de recherche, permettez-moi d'abord de vous rappeler le succès remarquable que notre établissement et l'École Polytechnique ont connu aux divers concours de la Fondation canadienne de l'innovation (FCI). Ensemble, nous arrivons au premier rang des universités canadiennes quant au nombre de projets financés (53) et au deuxième rang pour les sommes obtenues.

Le projet de technopole sciences-génie évolue très bien. Nous avons désigné les consortiums à établir, nommé les responsables du projet, préparé ou acheminé les demandes d'importantes subventions. Plus de 30 chaires seront proposées conjointement avec l'École Polytechnique dans le cadre de la Campagne des années 2000 et c'est en concertation avec notre école affiliée que les demandes pour les chercheurs boursiers sont présentées au FCAR. Enfin, un premier projet d'accueil d'un laboratoire public a été déposé au Conseil national de recherches du Canada. Il s'agit d'un centre des technologies de fabrication de pointe en aérospatiale.

Au cours de la présente année, les consortiums seront graduellement formés, des demandes communes importantes pour le développement de la technopole seront déposées à la FCI et nous établirons des chaires en partenariat avec les conseils subventionnaires. Par ailleurs, nous suivrons de près l'évolution du dossier du Centre de recherche en aérospatiale pour nous assurer de son implantation sur notre campus et nous élaborerons d'autres propositions pour l'accueil de laboratoires privés ou publics. Nous mettrons en place, conjointement avec l'École Polytechnique et l'École des Hautes Études Commerciales, une société de commercialisation des résultats de la recherche. Enfin le premier devis pour la construction de la technopole sera établi en cours d'année.

Dans le secteur des sciences sociales, nous avons soumis au Conseil de recherches en sciences humaines neuf projets d'alliances de recherche universités-communautés. Ces projets ont été si bien reçus par les évaluateurs que sept d'entre eux ont été retenus pour la deuxième ronde, ce qui représente un succès remarquable. Par ailleurs, les secteurs des sciences sociales et de l'éducation joueront un rôle de premier plan dans deux des consortiums de la technopole.

Nous travaillons présentement à un projet d'envergure sur les statistiques sociales, auquel collaboreront Statistique Canada, l'Institut de la statistique du Québec et probablement l'UNESCO.

Le Comité de la recherche examine en ce moment un rapport préliminaire sur l'élaboration d'un pôle de convergence dans le secteur des lettres et des sciences humaines. Le Comité devrait nous rendre compte à la fin de l'automne de ses conclusions et de son plan d'action.

Pour ce qui est du secteur de la santé, nous allons concentrer nos efforts pour atteindre les objectifs suivants: bénéficier au maximum des programmes de la FCI, en particulier dans nos deux centres hospitaliers; intensifier nos partenariats avec les instituts et les centres de recherche en santé affiliés à l'Université de Montréal; finaliser le plan de carrière des chercheurs Ph. D. en milieu clinique; assurer à l'Université de Montréal la place qui lui revient dans l'implantation des instituts canadiens de recherche en santé.

La planification
Au cours de la dernière année, un nouveau protocole d'évaluation des unités d'enseignement et de recherche a été élaboré, un guide d'évaluation a été rédigé et, en collaboration avec les facultés, le calendrier des évaluations a été préparé.

Un plan de reconfiguration physique du campus, adopté par le Comité de la planification, a été soumis au ministère de l'Éducation le 23 juin dernier. Le projet de rénovation des résidences étudiantes en est rendu au stade de l'appel d'offres, qui sera fait incessamment.

Enfin, un audit externe de la DITER est en cours. Les résultats de cet examen devraient nous être remis à la fin de l'automne et ils orienteront nos décisions et nos actions au cours de la présente année quant à l'organisation de ce service, au soutien technologique à l'enseignement et à la recherche et au renouvellement de nos systèmes informatiques de gestion.

En 1999-2000, en plus d'amorcer tout le processus d'évaluation des unités d'enseignement et de recherche, on travaillera à trois dossiers majeurs: 1) on finalisera et l'on déposera un plan d'action portant sur les différents volets de l'internationalisation de l'Université de Montréal; 2) en concertation avec la direction des bibliothèques, on élaborera un plan de développement des bibliothèques couvrant les acquisitions, l'informatisation, la numérisation et les collections; 3) enfin, à partir des grandes orientations présentées aux instances de notre établissement au cours de la dernière année, on préparera un plan stratégique pour la période 2000-2004.

Communications, affaires publiques et développement
Comme vous le savez sans doute, une réorganisation complète des services des communications, des affaires publiques et du développement a été entreprise au cours de la dernière année et les gains que nous récoltons grâce à cette réforme se font déjà sentir en ce qui concerne l'image et la présence de l'Université de Montréal dans les différents milieux. Par ailleurs, un travail considérable a été accompli pour préparer la Campagne des années 2000. Nous sommes fin prêts puisque la campagne Campus sera lancée le 14 octobre et la campagne externe en février 2000.

Clairement, les deux grandes priorités au cours de la présente année seront la grande campagne des années 2000 et le recrutement des clientèles étudiantes, qui nécessiteront le soutien actif de nos services des communications et de la publicité.

L'administration
Nous avons tout mis en oeuvre depuis un an pour améliorer la gestion de notre établissement. Notre première démarche a été d'informer régulièrement et complètement les responsables académiques et les directeurs de service et de tenir compte de leurs remarques et commentaires. Nous avons aussi tenté de répondre le plus rapidement possible aux demandes qui nous étaient faites et d'apporter des solutions aux nombreux problèmes qui ne cessent de surgir dans une université de l'importance de la nôtre. Nous sommes loin d'avoir atteint la perfection à cet égard, mais soyez assurés que nous y travaillons.

Une chose est claire, et les résultats que nous avons obtenus sur le plan financier le confirment assez: nous pratiquons actuellement une gestion responsable. En 1998-1999, l'Université de Montréal présentait un déficit de 5,1 millions de dollars, inférieur de 400 000$ à celui qui avait été prévu. Ce déficit représentait 5,9% du total des déficits courants des universités québécoises (87 millions). Et nous prévoyons, pour l'année 1999-2000, un déficit de 4,6 millions, ce qui représentera 5,2% du déficit courant prévu pour l'ensemble des universités québécoises. Il faut se rappeler que le budget de fonctionnement de l'Université de Montréal représente 18% du total des budgets de fonctionnement des universités québécoises. Nous comptons bien que cette gestion responsable sera prise en compte par le gouvernement québécois lorsque le moment sera venu pour lui de réinvestir dans les universités.

Un réinvestissement majeur est nécessaire de la part du gouvernement
L'Université de Montréal a agi de façon responsable, mais souffre d'un déficit de ressources qui met de plus en plus en cause la qualité même de ses programmes de formation et sa capacité de maintenir à un niveau compétitif sa vaste activité de recherche. Nous avons accompli notre travail, au gouvernement maintenant de faire le sien.

C'est l'objet du mémoire que nous avons soumis le 24 septembre dernier au ministre de l'Éducation. Ce dernier avait en effet demandé aux recteurs et rectrices des universités québécoises de lui remettre à la mi-septembre un rapport répondant aux questions suivantes:

1) Par rapport aux universités canadiennes et américaines qui vous sont comparables, quel est votre sous-financement?

2) Si des ressources supplémentaires vous étaient versées, qu'en feriez-vous pour rendre votre établissement plus compétitif et plus apte à répondre aux besoins de la société québécoise?

3) Enfin, quels sont les problèmes de la présente formule de financement et quelles solutions y apporteriez-vous?

Dans notre mémoire, nous avons tenté de répondre le plus clairement, le plus succinctement et le plus rigoureusement possible aux questions du ministre de l'Éducation. Et nous l'avons fait en comparant notre situation à celle d'un établissement de même profil que le nôtre, l'Université de Toronto. Cette dernière se définit comme la grande université canadienne de calibre international au service des Canadiens. L'Université de Montréal, l'École Polytechnique et l'École des HEC représentent le seul complexe universitaire francophone qui ait joué ce rôle au Québec et dans l'ensemble du Canada, et il entend bien continuer à occuper une place de premier ordre sur l'échiquier universitaire mondial. Pour ce faire, cependant, il doit bénéficier de ressources analogues à celles de l'Université de Toronto et des universités américaines comparables. Ces dernières établissent les normes de qualité en matière de formation et de recherche pour l'ensemble des établissements du continent. Pour préserver la qualité de l'enseignement et de la recherche à l'intérieur de ses frontières, il est indispensable que le Québec consente à ses établissements universitaires les mêmes ressources que les États-Unis et le Canada anglais accordent à leurs universités selon leur mission respective. Croire qu'il pourrait en aller autrement, c'est, dans l'état actuel des choses, se bercer d'illusions.

Présentement, nous évaluons à quelque 2860$ l'écart dans le niveau de dépenses par étudiant pondéré entre l'Université de Montréal et l'Université de Toronto. Cet écart entraîne pour l'Université de Montréal, à l'exclusion des écoles affiliées, un déficit annuel de ressources de l'ordre de 180 millions de dollars. C'est donc de ce montant qu'il faudrait que le budget de fonctionnement de l'Université de Montréal soit augmenté pour que nous puissions offrir à nos étudiants et à nos chercheurs des services de qualité comparables à ceux que l'Université de Toronto offre à ses étudiants et à ses chercheurs. Il est évident que, plus on repoussera le moment du réinvestissement, moins il sera possible de combler l'écart et plus des dommages irréparables auront été causés au système universitaire du Québec. Le temps presse.

Conclusion
En somme, nous devons être fiers du travail que nous avons accompli tous ensemble en 1998-1999 pour amorcer la relance d'un établissement dont tous reconnaissent l'importance pour l'avenir du Québec. Ce travail exigeant porte déjà ses fruits et place l'Université de Montréal dans une position unique à la veille du réinvestissement que devra faire le gouvernement dans les universités québécoises. Le grand sens des responsabilités dont nous avons collectivement fait preuve nous sera extrêmement bénéfique dans les années qui viennent.

L'Université de Montréal a tourné la page de la morosité. Nous avons commencé à construire l'Université du 21e siècle en comptant d'abord sur nos propres moyens, notre sens de l'innovation et notre enthousiasme. Nous avons maintenant besoin de l'aide gouvernementale et de l'appui des diverses composantes de la société québécoise pour poursuivre ce travail. Le Québec ne peut faire l'économie d'un complexe universitaire francophone d'envergure.


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