Une rentrée en force

L'Université de Montréal accueille des centaines d'étudiants de plus que l'an dernier.

Cette année, les initiations seront colorées mais sobres.

Le nombre de candidats autorisés à s'inscrire à l'un des programmes d'études de premier cycle de l'Université de Montréal (excluant ceux de la Faculté de l'éducation permanente et des écoles affiliées) a connu une hausse de 15 % en un an. Pour le registraire Fernand Boucher, c'est une excellente nouvelle, d'autant plus que ce nombre était en baisse constante depuis 1992.

"Ces statistiques ne sont pas définitives, tient-il à expliquer; les données officielles pour l'admission ne seront pas connues avant le mois d'octobre. Mais en date du 13 août, si l'on compare avec les années passées, c'est très encourageant."

M. Boucher, qui est d'un naturel réservé, laisse paraître en cette rentrée de 1999-2000 un enthousiasme qu'on ne lui connaissait pas. "Soyons pessimistes, dit-il le sourire aux lèvres, et estimons que seul un candidat sur deux fera sa rentrée en septembre. Alors nous compterions quelque 650 étudiants de plus qu'à pareille date l'an dernier. Ce nombre pourrait atteindre les 800. Ce serait énorme. D'autant plus que ce sont, de manière générale, des étudiants réguliers, à temps plein, de jour."

Les bonnes nouvelles se retrouvent également du côté des étudiants à temps partiel, principalement inscrits à la Faculté de l'éducation permanente. Alors qu'on avait enregistré l'an dernier une baisse sensible, la situation s'est stabilisée cette année.

Aux cycles supérieurs, les demandes sont en hausse de six pour cent au deuxième cycle, mais le troisième cycle enregistre une légère baisse. Comme les étudiants à la maîtrise sont plus nombreux, la Faculté des études supérieures peut s'attendre à une hausse, elle aussi.

Résultat d'efforts
Ces hausses généralisées résultent d'un effort déployé dans tous les coins du campus afin d'accueillir plus d'étudiants. Dans bon nombre de programmes contingentés, la limite maximale d'étudiants a été repoussée. En psychologie, par exemple, on passe de 225 places disponibles à 300; en biochimie, le nombre de places passe de 100 à 120; en ergothérapie, il augmente de 25; en pharmacie, de 20; en nutrition et en physiothérapie, de 10. Pour tous ces programmes, la demande dépassait largement l'offre, de sorte que cette mesure ne tardera pas à donner des résultats. À noter, dans le cas du doctorat en médecine et du programme de formation des maîtres, les contingentements sont fixés par l'État, non par l'Université.

L'augmentation de la capacité d'accueil n'est pas la seule décision qui ait été prise pour attirer des candidats, signale M. Boucher. Il y a eu l'an dernier la création de plusieurs nouveaux programmes comme les programmes bidisciplinaires, le baccalauréat Sécurité et police et le tout nouveau "baccalauréat 120". Destiné aux étudiants du postsecondaire venant d'un système scolaire étranger, il consiste en une année de transition avant d'entrer dans un programme régulier.

De plus, un travail a été accompli à l'extérieur du campus. "Le Bureau du recrutement a beaucoup contribué à faire connaître l'Université auprès des clientèles cibles. Des gens se sont rendus jusqu'à Moncton pour promouvoir les nouveaux programmes", explique M. Boucher.

L'Université est-elle prête à faire face à cette augmentation subite des effectifs? "Oui, répond sans hésiter le registraire, même si les gains financiers amenés par cette augmentation de la clientèle ne se feront sentir que dans un an et demi. L'Université a prévu d'embaucher plus de chargés de cours, notamment, de manière à ne pas nuire à la qualité de l'enseignement."

Les étudiants sont prêts
Cette augmentation de la population étudiante inquiète tout de même Patrick Lebel, secrétaire général de la Fédération des associations étudiantes du campus de l'Université de Montréal (FAECUM). "Nous craignons que l'encadrement et la qualité de l'enseignement en subissent les conséquences", dit-il.

Cette question est au centre des préoccupations de la plus grosse fédération étudiante du Québec, qui compte 74 associations et 25 000 membres. Préoccupé par l'évaluation de l'enseignement, à laquelle les étudiants doivent participer plus activement, M. Lebel prétend que l'Université de Montréal devrait investir dans l'amélioration de la qualité de l'enseignement.

Il souligne que la FAECUM tentera, cette année encore, d'améliorer les conditions socioéconomiques des étudiants qui ont, chaque année, la vie un peu plus dure.

La Fédération s'intéresse également aux activités socioculturelles qui égaient le campus. Au moment où il était interviewé par Forum, Patrick Lebel signalait que les bénévoles mettaient la dernière main aux activités de la rentrée. Parmi les incontournables party deux étages, épluchette de blé d'Inde et stands d'information (voir le calendrier), une nouveauté cette année: le spectacle des Colocs en plein Hall d'honneur, sous la grande tour. La FAECUM voulait un happening donnant à l'Université une visibilité nouvelle. "Plus cool."

"La nouvelle administration a une attitude différente de la précédente. Elle a de bonnes idées, d'autres moins bonnes. Mais quand nous avons proposé ce projet, elle a accepté et nous sommes très contents", dit le secrétaire général.

M. Lebel signale qu'il ne faudra pas non plus manquer le jeu-questionnaire "Bols et bolles" mettant aux prises une équipe du rectorat et les représentants étudiants. L'affrontement aura lieu le 8 septembre au bar Le crocodile. Présenté sur le modèle du jeu télévisé Génies en herbe, "Bols et bolles" met en présence deux équipes de quatre membres. Ils doivent répondre le plus rapidement possible à des questions sur l'actualité, l'histoire et le campus de l'Université de Montréal.

Mathieu-Robert Sauvé

Un guide de l'initiation

Chaque début septembre, le campus de l'Université de Montréal est envahi par une faune excentrique et bigarrée qui circule bruyamment dans le quartier Côte-des-Neiges. Il s'agit des nouveaux étudiants qui, bon gré mal gré, subissent leur initiation.

Dans un document distribué durant l'été à tous les responsables de cette activité colorée, le coordonnateur des relations étudiantes de la FAECUM, Alexandre Paris, signale que l'Université de Montréal est l'une des dernières au Québec à permettre les initiations. Il recommande donc aux responsables la plus grande prudence dans leur enthousiasme. "Rappelez-vous, écrit-il dans la deuxième édition du Guide de l'initiation, que vous êtes personnellement responsables de vos étudiants au même titre qu'un moniteur de camp de vacances est responsable de ses campeurs."

Quelques conseils sont prodigués en ce qui concerne l'éthique, la consommation d'alcool, la sécurité, la propreté et la façon de convoquer les nouveaux sans les forcer à participer. Car si les initiateurs aimeraient que le taux de participation approche les 100 %, ils doivent demeurer dans les limites permises. "Bien sûr, écrit M. Paris, il est louable d'encourager la participation mais certainement pas de force. La ligne est mince entre la pression acceptable pour participer aux activités et l'usage de la force. Il faut donc faire attention pour ne pas la franchir."

Question d'éthique, on déconseille les jeux à caractère sexuel comme la chaîne de vêtements consistant à attacher bout à bout les vêtements des participants. "Il s'agit, le plus souvent, d'activités qui n'entraînent pas de grande participation et qui sont souvent une forme de power trip de la part des initiateurs. Elles sont à éviter."

Au chapitre de la consommation d'alcool, on ne recommande pas la sobriété pure, mais on suggère d'organiser des activités où des boissons non alcoolisées sont au menu.

La FAECUM ne dénonce pas les activités d'initiation, qu'elle considère comme un bon moyen de créer des liens. Elle donne même un truc pour rassembler les nouveaux dans un même lieu. "Vous envoyez une lettre à vos étudiants spécifiant qu'ils doivent se présenter à tel local pour un test de classement ou pour un cours introductif. Une fois sur place, vous pouvez facilement jouer la comédie."

M.-R.S.