FORUM - 5 JUIN 2000

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La collation des grades: un spectacle du haut savoir

Les Archives retracent les variantes à travers les âges.

Son Éminence le cardinal Paul-Émile Léger, chancelier de l'Université de Montréal, remet un diplôme de baccalauréat en droit à Michel Lemoine à la collation des grades de 1963.

Depuis les origines des universités, au Moyen Âge, la collation solennelle des grades a toujours représenté le couronnement de la formation universitaire. Mais cette cérémonie a connu des variantes tout au long de l'histoire.

Ici, à l'Université de Montréal, les diplômés des trois cycles sont aujourd'hui plus de 12 000 alors qu'ils n'étaient que quelques centaines au début des années 1920. S'il fallait, comme autrefois, tous les inviter à la même cérémonie et les appeler un à un, on en aurait pour une semaine. C'est pourquoi, depuis le 11 mars 1969, la collation solennelle des grades est réservée aux étudiants au doctorat.

"Si les maîtres qui les ont formés se défendent assez mal contre une émotion à nuance de tristesse, en voyant partir ces jeunes gens qui emportent avec eux quelque chose de leur vie, d'autre part ils éprouvent un sentiment de satisfaction et de fierté en les présentant à la société", disait le recteur Mgr A.-V.-J. Piette au cours de son discours, le 27 mai 1927.

Tenant des propos bien de son temps, l'ecclésiastique reprenait: "Ces phalanges de beaux jeunes hommes qui sortent de nos cours, leur parchemin à la main, qualifiés, bien préparés, pleins d'ardeur pour aller donner à leurs nouveaux devoirs et pour fortifier notre élite sociale, c'est la manifestation et le rendement de l'oeuvre universitaire. C'est le noble cadeau qu'elle fait à la nation, c'est la plus magnifique rétribution que notre université puisse offrir à l'Église qui lui fait confiance, aux pouvoirs publics qui l'aident, aux citoyens éminents qui s'y dévouent, au peuple qui la comprend, s'y intéresse et lui confie ses enfants."

Un spectacle haut en couleur
On ne vient pas à la collation des grades avec ses habits de rue. On revêt la toge. Cousue dans la soie, elle révèle la hiérarchie selon ses différentes parures: épitoge en hermine, manches bleues, bleue et jaune, cordon bleu, toque avec gland doré. De plus, à l'Université de Montréal, les étudiants portaient autrefois le béret. Aujourd'hui, le chapeau plat de type anglais en feutre noir avec un gland noir est la coiffure de circonstance.

Le protocole exige un ordre strict. Les représentants de l'Université aux couleurs chatoyantes, les diplômés de noir vêtus regroupés selon leur faculté ou école s'avancent à tour de rôle dans la salle des promotions.

Comme s'il s'agissait d'un spectacle, la collation des grades s'organise avec doigté. L'Université veut se montrer avec élégance.

"La collation des grades a lieu à 9 h 30 de l'avant-midi", précisent les règlements révisés de l'Université de Montréal en 1930. La première partie de la collation comprend les doctorats ad honorem (honoris causa). Puis, les secrétaires des facultés et écoles remettent les doctorats académiques et professionnels. Par la suite, "le groupe de docteurs en médecine reprend sa place et prononce le serment d'Hippocrate".

La deuxième partie comprend la remise des diplômes de licence et de baccalauréat et des diplômes de fin d'études. Le secrétaire de chaque faculté ou école annonce le nom des récipiendaires. À mesure que ceux-ci se présentent, le recteur leur applique la main droite sur l'épaule.

La troisième partie est la remise, par le secrétaire de chaque faculté ou école, des certificats d'études supérieures et des diplômes spéciaux.

La cérémonie se termine par l'annonce des prix spéciaux. L'étudiant qui, pour une raison grave acceptée par le doyen, ne peut pas être présent, reçoit son diplôme in abstensia.

Les temps changent
De nos jours, la collation solennelle des grades a lieu le dernier vendredi du mois de mai. Mais certaines facultés et écoles préfèrent organiser leur cérémonie au printemps et à l'automne pour les premier et deuxième cycles.

Bien que l'Université ait un statut laïque, la cérémonie débute par une prière dite par le doyen de la Faculté de théologie. Ensuite, le recteur prononce une allocution. Suit la collation des grades de doctorat. Après la remise des diplômes, un représentant prononce un discours au nom de tous les diplômés. Pour mériter cet honneur, l'étudiant doit répondre à certaines conditions et présenter un dossier universitaire qui justifie cet honneur. Ce dernier critère est le plus important parce que le porte-parole s'exprime au nom de ses homologues. L'honneur revient alternativement à un homme, puis à une femme.

Par la suite, on procède à la remise des médailles académiques du Gouverneur général. Des médailles d'or et d'argent sont décernées. La cérémonie se poursuit par les prix d'excellence en enseignement. De plus, il y a la désignation des professeurs émérites et des docteurs honorifiques. Un des lauréats parle au nom de tous. Parents et amis sont invités.

La cérémonie, qui dure deux heures et demie, s'étendait sur toute la journée jusqu'en 1969.

Denis Plante
Archiviste
Division des archives (http://www.archiv.umontreal.ca)

Sources: Rapport du recteur (1922-1927), Université de Montréal, septembre 1927, 30 pages. Germaine Cornez, Une étape de vie universitaire, 1942, 124 pages. Règlements révisés de l'Université de Montréal, 2e édition, 1930. P. Ch. Verdière, Les anciennes universités et la collation des grades, Paris, 1879, 140 pages.

L'auteur tient à remercier pour leur aide Jean-Maurice Brisson, de la Faculté des études supérieures, Jacques Larose, du Secrétariat général, Richard Dupuis et Gino Cacchione, de la Direction des immeubles, Jacques St-Pierre, Marie-France Boivin, stagiaire à la Division des archives, et James Lambert, de l'Université Laval.


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