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Comment gérer risques et catastrophes

Hélène Denis est nommée membre de la commission Nicolet sur la crise du verglas.

  Hélène Denis, Comprendre et gérer les risques sociotechnologiques majeurs, Éditions de l'École Polytechnique de Montréal, 1998, 342 pages.

Au moment où les pylônes d'Hydro-Québec s'effondraient sous le poids du verglas, les presses des Éditions de l'École Polytechnique continuaient de tourner pour nous livrer un ouvrage prédestiné: Comprendre et gérer les risques sociotechnologiques majeurs, de la professeure Hélène Denis.

Spécialiste en sociologie des organisations, Mme Denis est bien connue pour son expertise dans le domaine de la gestion des risques et des catastrophes. En 1988, le gouvernement du Québec lui confiait le mandat d'étudier la gestion de la crise consécutive à l'incendie de BPC à Saint-Basile-le-Grand. Son expertise a également été mise à contribution pour des études de même nature après le passage d'une tornade en 1995 à Aylmer et le déraillement d'un train transportant des produits toxiques à Lennoxville.

Moins d'une semaine avant le lancement de son volume, soit le 17 février dernier, Hélène Denis était nommée membre de la commission Nicolet chargée d'évaluer la gestion de la crise du verglas.

 

Le facteur humain

Ce volume vient sûrement combler un besoin sur le sujet puisque, comme elle le signale, "il y a très peu de publications pour aider les 'gestionnaires de l'urgence' avant qu'une catastrophe survienne".

"L'idée principale en filigrane du livre, poursuit l'auteure, est qu'il n'existe pas de technologie pure et neutre. La technologie toute seule, ça n'existe pas; elle est toujours opérée par des humains, est liée au contexte de la culture d'entreprise et peut être influencée par les décisions administratives."

Tenir compte du facteur humain est donc essentiel pour gérer un risque avant qu'éclate la catastrophe. "La gestion du risque, c'est donc beaucoup plus que l'élaboration de plans. Cela inclut l'entretien de l'équipement, les décisions quotidiennes, l'organisation du travail, les mesures de sécurité et d'atténuation. Cette partie de la gestion des risques ne se voit pas; elle est comme la boîte noire qu'on n'examine qu'après la catastrophe."

Une autre idée maîtresse qu'Hélène Denis tire des crises qu'elle a analysées, c'est l'aspect systémique propre à toute catastrophe. "Une catastrophe est composée de multiples éléments dont il faut comprendre les interdépendances avant d'accuser un seul de ces éléments, écrit-elle. Par exemple, l'état d'ébriété du pilote de l'Exxon Valdez ne doit pas faire oublier les problèmes, dus en partie aux compressions budgétaires, qui se sont posés dans les organisations comme la Garde côtière ou Exxon."

À partir du seul exemple de ce naufrage, elle a défini par moins de 10 éléments indépendants ayant concouru à en faire une catastrophe écologique majeure. Dans le cas du verglas, il lui apparaît facile de faire de la Sécurité civile le bouc émissaire des événements, alors que c'est tout le système sociotechnologique global qui est concerné.

 

Risque zéro

La gestion du risque pose par ailleurs la question du niveau de risque acceptable. "Le risque zéro n'existe pas, se plaît-elle à répéter, et l'on ne peut pas vivre dans une cellule capitonnée. Cela dit, il ne faut pas non plus tomber dans le laxisme et tolérer n'importe quoi. Il est possible de limiter les dégâts par des mesures préventives. En traversant au feu vert, on met les chances de son côté."

Hélène Denis ne croit pas à l'inévitabilité. Face à l'imprévisible ou à l'improbable, la question à se poser à son avis est de savoir dans quel type de société nous voulons vivre, quel niveau de sécurité nous voulons nous donner et à quel prix.

Le volume Com-prendre et gérer les risques sociotechnologiques majeurs se voulait à l'origine un manuel destiné aux étudiants inscrits au cours en analyse et gestion des risques. "Mais puisque le risque est sociotechnologique, s'est dit l'auteure, il nous a semblé que le livre pouvait intéresser toute personne qui se préoccupe de la question et qui cherche à comprendre les multiples facettes de ce sujet complexe."

Le volume s'adresse donc autant aux spécialistes de la technologie, aux experts en sociologie, en psychologie ou en médecine qu'aux profanes qui veulent en savoir plus sur ces risques inhérents à la société industrielle.

Daniel Baril


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