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Obésité chez l'enfant:
un traitement fort simple

Mais difficile à administrer, explique l'endocrinologue Céline Huot.


Une étude américaine récente révèle que 25% des enfants sont obèses. La pizza et les boissons gazeuses sont au menu tandis que les jeux Nintendo, Internet et la zapette ont eu raison de leurs dernières envies de jouer dehors.

Même si cette étude ne portait pas sur les Québécois, on peut penser qu'ici aussi l'obésité endogène (résultant de troubles métaboliques ou endocriniens) ne joue qu'un rôle mineur dans ce nouveau fléau. En tout cas, 99% des enfants obèses qui aboutissent dans le bureau de la Dre Céline Huot, à l'hôpital Sainte-Justine, ne souffrent d'aucun problème glandulaire ou endocrinien.

"Mon 'client type' est un préadolescent de la fin du primaire, explique l'endocrinologue, professeure au Département de pédiatrie. Il vient en consultation accompagné de ses parents et s'attend à se faire confirmer une perturbation physiologique. Il va jusqu'à dire: 'Je suis gros, je ne suis pas beau, mais il ne peut en être autrement.' Pourtant, son problème n'est pas compliqué: il dépense moins de calories qu'il en absorbe."

Le traitement d'une telle pathologie est d'une simplicité déconcertante et ne coûte pas un sou: "descendre de l'autobus un coin de rue avant l'arrêt habituel, emprunter l'escalier au lieu de l'ascenseur, aller jouer dehors et manger mieux".

Mais il n'est pas facile à administrer, car la personne obèse manque cruellement de motivation.

 

Une situation qui dégénère

En 15 ans de pratique, la Dre Huot a constaté une dégradation de la situation. Par exemple, trois des sept nouveaux patients admis à sa clinique la veille de sa rencontre avec Forum souffraient d'obésité. Sur les 22 patients reçus régulièrement par sa clinique, qui accueille aussi les personnes de courte taille, la plupart souffrent d'un excès de poids. Céline Huot a remarqué que la pensée magique est présente chez cette clientèle. "Une femme de 4 pi 10 po et un homme de 5 pi 3 po ne comprennent pas pourquoi leur fils n'a pas le gabarit d'un joueur de hockey!"

Les désordres de la glande thyroïde ou des surrénales existent bel et bien, mais ils sont si rares qu'ils comptent pour négligeables dans le phénomène de l'obésité. Résultat: la spécialiste doit faire avec ses patients ce qu'aucun médecin n'a fait avant elle. "Je m'assois avec l'enfant et ses parents et je les questionne sur leurs habitudes de vie."

Si le diagnostic est facile et que le traitement est connu et éprouvé, le travail du médecin n'est pourtant pas simple. "Nous avons besoin de la collaboration d'une équipe multidisciplinaire incluant le médecin de famille, un nutritionniste et, très souvent, un psychologue. Mais plus que tout, les parents doivent nous aider."

Le phénomène est inquiétant compte tenu des complications reliées à cette condition. L'hypertension artérielle et les accidents cérébro-vasculaires, notamment, sont deux fois plus fréquents chez les obèses que chez les maigres. Il y a bien une composante génétique dans l'obésité, mais il est difficile d'en évaluer l'importance. Selon l'Encyclopédie médicale de la famille, les enfants de parents obèses sont 10 fois plus susceptibles de devenir obèses que les enfants de parents dont le poids est normal.

Percutante démonstration des fondements comportementaux de l'obésité, la clinicienne a remarqué que les immigrants venant de pays où les obèses sont rares, par exemple le Vietnam, commencent à présenter les signes d'un poids excessif. "Autrefois, on ne voyait pas ça. Il semble que ces gens-là adoptent les moeurs nord-américaines."

Également spécialiste du diabète, la Dre Huot mène une recherche sur le dépistage précoce du diabète juvénile. Elle a remarqué que le taux d'insuline sécrété par les enfants obèses était particulièrement inquiétant, bien avant que les premiers symptômes du diabète se manifestent.

 

Que faire?

La toute première chose à faire pour corriger un problème d'obésité, c'est de le reconnaître, signale la clinicienne. Ensuite, il faut trouver une source de motivation. "Je donne le choix à mon patient: ou il augmente la dépense d'énergie, ou il en diminue l'entrée."

Pour le stimuler, elle lui suggère parfois un "contrat". "Je lui dis: 'OK, ton objectif, c'est de te maintenir au même poids pendant un mois ou deux.' Ça passe mieux de cette façon. Ce que je ne dis pas, c'est que l'enfant est en pleine croissance. S'il garde le même poids et qu'il grandit, cela équivaut à un amaigrissement."

Il est rare qu'un enfant préfère un fruit à un morceau de gâteau garni de glaçage au chocolat...

Reste la question de la nutrition. Peu d'enfants préfèrent un fruit à un morceau de gâteau garni de glaçage au chocolat. C'est sans doute "culturel". Tout comme la télévision, Internet et le Seven-Up.

Si elle reconnaît les bienfaits de l'ère de l'information, la Dre Huot croit qu'il est primordial que les parents exercent un contrôle sur les sources de divertissement qui favorisent la sédentarité. Elle-même mère de trois enfants, elle permet une heure trente de télé par enfant par fin de semaine. "Pas plus!"

Mathieu-Robert Sauvé


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