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Seul homme parmi 14 femmes

André Beaulne est très apprécié pour sa joie de vivre.

André Beaulne est arrivé au M-705 à titre de surnuméraire pour un contrat de un mois. C'était en 1971. Un quart de siècle plus tard, il y est toujours. «J'ai quand même changé de bureau, dit le technicien en documentation. Quand j'ai commencé, j'occupais celui-là», dit-il en indiquant un poste de travail à trois mètres de sa chaise.

Véritable coqueluche du service qui compte 15 personnes (dont 14 femmes), André Beaulne est particulièrement apprécié pour sa bonne humeur et sa convivialité. «Il a un humour très communicatif», signale Sylvie Bayard, secrétaire. «On est dans un meilleur esprit grâce à lui», renchérit une collègue.

«J'aime beaucoup rire, confie le jeune quinquagénaire qui a fêté ses 25 ans de service et son 50e anniversaire en août dernier. J'essaie de détendre l'atmosphère. Vous savez, l'automne a été dur.»

Le Service des acquisitions, par lequel transitent la plupart des monographies et périodiques de 22 des 23 bibliothèques du campus (la Faculté de médecine est autonome), n'est pas épargné par les changements organisationnels qui touchent l'Université. Le système Innovac, instauré en 1982 pour gérer les périodiques, est progressivement remplacé par Atrium. Le nouveau système de catalogage permettra d'effectuer la plupart des opérations actuellement réalisées par le Service des acquisitions.

Un service menacé?

Depuis son entrée aux bibliothèques, André Beaulne a vu passer quatre patrons et autant de recteurs. Mais 25 ans sur la même chaise, n'est-ce pas lassant? «Non, répond l'intéressé. Mon travail n'est jamais tout à fait le même d'un jour à l'autre.»

Avec Jocelyne Durocher, l'autre technicienne en documentation, André Beaulne s'occupe de la facturation et de l'acheminement des quelque 8000 périodiques qui prennent le chemin des bibliothèques. «Ce matin, par exemple, on me signale que le Canadian Journal of Animal Science est en retard depuis le 1er janvier. Je vais donc communiquer avec l'éditeur pour, au besoin, en commander un exemplaire.»

De plus en plus, les échanges se font par télécopieur ou par Internet, mais la grande majorité des éditeurs préfèrent encore le courrier de Sa Majesté.

André Beaulne a aussi vu passer des changements technologiques, lui qui a commencé «à la mitaine» avant d'adopter, du jour au lendemain, l'informatique en 1982. «Nous n'étions pas très familiarisés avec les ordinateurs à cette époque. Je me souviens qu'un bibliothécaire a tellement eu peur de ne pas s'adapter qu'il a pris sa retraite!»

Selon lui, un des avantages d'Atrium est que tous les membres de la communauté universitaire pourront suivre le cheminement des périodiques à partir de leur ordinateur. Cependant, ces changements technologiques risquent, à plus ou moins long terme, de sonner le glas du Service des acquisitions. D'ici juin, en principe, l'entrée des données devrait être terminée, mais dans les faits il faudra compter de six mois à un an avant que le tout soit bien rodé. «Pour nous, c'est une véritable révolution», dit-il.

La période actuelle constitue selon lui un moment charnière dans ses 25 ans de métier. «Nous vivons une transition. Les livres sont encore là mais cohabitent avec les microfilms, les microfiches, Internet, les cédéroms, etc. Il faut bien connaître tous ces supports. L'informatisation a changé la vision de la bibliothèque.»

Un bac en pédagogie

André Beaulne ne s'attendait pas à passer la moitié de sa vie dans une bibliothèque; il se destinait plutôt à l'enseignement. Après des études à l'école normale Ville-Marie, au collège Saint-Laurent et à l'Université de Montréal, il obtient un baccalauréat en pédagogie et une licence en enseignement.

«J'ai enseigné quatre mois et cela a été suffisant, dit-il aujourd'hui. Je crois que je n'étais pas fait pour ce métier.»

Disons qu'il a joué de malchance. Bien qu'il ait été spécialisé en histoire, le seul poste qu'il réussit à dénicher fut un poste de professeur de français dans une école anglophone. Et ce, durant les événements d'octobre 1970, au plus fort des tensions politiques entre les deux groupes linguistiques. Et de plus, «je découvre que je perds la voix après une heure de cours!»

Ce coup du destin l'amène à poser sa candidature à l'Université de Montréal en avril 1971. «Au fond, je suis resté dans le milieu scolaire. Et puis j'ai conservé mon intérêt pour l'histoire.»

Spécialiste de la Révolution française, il profite des pauses-café pour entretenir ses collègues des bons coups de Talleyrand et Napoléon. Mais il ne se limite pas à cette époque. «On connaît mal le Moyen Âge, dit-il. On croit à tort que c'est une époque noire, barbare. Au contraire, on y retrouve les racines de l'ère moderne.»

Et comment vit-il son statut de «seul homme parmi 14 femmes»? «J'aime bien mes collègues», dit-il laconiquement.

Puis il ajoute à mi-voix: «Je ne peux pas vous en dire plus, je sens qu'on me surveille...»

Mathieu-Robert Sauvé


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