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Montréal aura-t-elle
sa «très grande bibliothèque»?

Réjean Savard siège à un comité qui étudie la question.

Après Vancouver, Los Angeles, San Francisco, Denver, San Antonio, Londres et surtout Paris, Montréal comptera-t-elle au centre-ville un grand bâtiment exclusivement consacré aux livres et à la lecture?

«En tout cas, les besoins pour une bibliothèque grand public sont criants à Montréal», répond Réjean Savard, professeur à l'École de bibliothéconomie et des sciences de l'information. Avec cinq autres spécialistes, il vient d'être nommé par la ministre de la Culture, Louise Beaudoin, à un comité qui aura pour mandat d'«examiner la pertinence de développer le concept d'une très grande bibliothèque au Québec».

Pourquoi une bibliothèque de plus alors que beaucoup croient qu'Internet et les diverses bretelles de l'autoroute de l'information menacent l'industrie du livre? Réglons cette question tout de suite: «Parce que les spécialistes s'entendent sur le fait qu'on en a pour 20 à 25 ans au moins à vivre avec les deux supports: le papier et l'électronique. Il va falloir s'y faire», répond M. Savard.

Selon le professeur, les bibliothèques dites «nationales» répondent à des besoins très clairs de conservation. Destinées à l'entreposage des archives d'une nation, elles en sont un peu la mémoire collective. C'est pourquoi, en général, on ne peut que consulter sur place les documents que l'on y trouve.

Pour ce qui est des bibliothèques municipales, elles ont un rôle de diffusion et d'animation culturelles. On y conserve des collections en demande ainsi qu'un fonds assez traditionnel d'ouvrages de référence.

«Les deux systèmes sont complémentaires, explique M. Savard. Et de plus en plus, on constate qu'ils doivent fonctionner en réseau afin que, dans le cas où la bibliothèque de quartier ne pourrait répondre à notre demande, on ait accès directement à la bibliothèque centrale, voire nationale.»

Un réseau peu efficace

La Bibliothèque centrale de Montréal, rue Sherbrooke, a été rénovée récemment au coût de deux millions de dollars. «Pourtant, dit M. Savard, elle compte une surface de 5000 mètres carré alors qu'elle devrait en avoir trois fois plus. Parallèlement, la Bibliothèque nationale du Québec a aussi besoin de plus d'espace. Pourquoi ne pas fusionner les deux?»

Il est important de souligner que la création d'une très grande bibliothèque (TGB) au centre-ville ne menacerait pas l'existence des bibliothèques de quartier. Les deux réseaux y gagneraient.

Cette TGB de Montréal pourrait même insuffler un dynamisme intéressant au centre-ville. À Vancouver, où la nouvelle bibliothèque (magnifique oeuvre de Moshe Safdie) a été inaugurée au printemps 1995, il y a des files d'attente à l'ouverture des portes chaque matin.

Chacune des grandes bibliothèques qui ont été construites depuis cinq ans dans les villes mentionnées au début de cet article a sa «spécialité». Ici, on trouve une collection de livres d'art, là des ouvrages rares ou des activités d'animation originales. À Toronto, une salle est exclusivement consacrée à Sherlock Holmes. Mais aucune n'ignore le formidable pôle d'attraction que constituent les nouvelles technologies de l'information.

«C'est d'ailleurs un peu le drame des étudiants d'ici, note au passage M. Savard. Ils doivent être aussi efficaces sur Internet que dans les méthodes de bibliothéconomie utilisant le support papier. Ils doivent tout savoir...»

Des partenaires recherchés

La question qui préoccupe le plus le comité est évidemment le coût du projet. Puisqu'on ignore encore où logera la TGB (une construction neuve? un agrandissement?), on ne veut pas donner de chiffres. On sait en tout cas que le projet de Vancouver a frôlé les 100 millions de dollars, dont 17 millions sont provenus d'une campagne de financement. Et la population de cette ville est comparable à celle de Montréal.

On s'attend à ce que l'État n'assume pas seul les frais de cet imposant projet. Des partenaires pourraient offrir leur participation d'une manière qui reste à définir. «Un propriétaire pourrait par exemple construire l'immeuble et le louer à la TGB grâce à un bail emphytéotique», signale Réjean Savard.

L'emplacement idéal serait au croisement de deux lignes de métro, comme à la station Berri-UQAM. Depuis le tollé provoqué par une suggestion d'occuper l'immeuble de Simpson, au centre-ville, on est prudent.

Outre M. Savard, le comité réunit, sous la présidence de l'ancien ministre des Affaires culturelles Clément Richard, Philippe Sauvageau, président de la Bibliothèque nationale du Québec, Jacques Panneton, bibliothécaire en chef de la Ville de Montréal, Odette Duplessis, directrice des projets spéciaux au ministère de la Culture, et Louis Gendreau, directeur des programmes d'enseignement et de recherche au ministère de l'Éducation. Le comité doit remettre son rapport au mois de juin.

Mathieu-Robert Sauvé


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