Volume 1, numéro 1

Radiologie
Les pulsions sexuelles en observation

Le siège de la tempérance existe. Il est situé dans le lobe préfrontal du cerveau. C'est du moins ce que le neuropsychologue Mario Beauregard a constaté au cours d'une expérience menée dans son laboratoire auprès de 12 hommes âgés de 20 à 30 ans à qui il avait demandé de maîtriser leur excitation sexuelle en regardant des scènes érotiques très explicites. "C'est clair, relate le chercheur. Les images du cerveau en action, obtenues par résonance magnétique, montrent une activité intense dans le lobe préfrontal."

La tempérance ("modération dans tous les plaisirs des sens", selon Le petit Robert), ou plus précisément le contrôle de l'excitation sexuelle, relèverait donc d'un organe propre aux primates, mais particulièrement développé chez les humains. Le lobe préfrontal du cerveau est en effet la dernière partie du système nerveux à être apparue au cours de l'évolution. Les chimpanzés possèdent un lobe préfrontal, mais son volume ne dépasse pas 25 % de celui de leurs cousins humanoïdes.

Par comparaison, les zones activées lorsque les volontaires laissent libre cours à leurs pulsions en visionnant des scènes érotiques sont situées dans des régions plus "primaires". Le système limbique (région cérébrale comprenant l'hippocampe, le septum et l'amygdale, parfois qualifiée de "cerveau de l'émotion") réagit très fortement devant des scènes X, alors que le cortex préfrontal est plutôt discret.

Les résultats de la recherche du professeur Beauregard, effectuée en collaboration avec une doctorante et un chercheur de l'Université de Montréal, Johanne Lévesque et Pierre Bourgouin, seront publiés sous peu dans une revue majeure, le Journal of Neuroscience. L'article précise que le "contrôle de soi relève d'un circuit neuronal comprenant différentes régions préfrontales et structures limbiques".

Âgé de 39 ans, Mario Beauregard n'en est pas à ses premiers travaux dans le domaine de l'imagerie médicale. Ce diplômé postdoctoral du National Institute of Health et de l'Institut neurologique de Montréal, après un doctorat à l'Université de Montréal, a toujours eu un faible pour les rapports entre le cerveau et les émotions. "Ce qui m'intéresse, c'est l'imagerie du cerveau en action. Comment l'esprit, la conscience s'expriment sur le plan neurologique." Les chercheurs en viendront-ils à observer l'âme humaine ? "On voit en tout cas comment les circuits neuronaux agissent au cours de différentes activités où les émotions et le contrôle de soi sont mis à contribution", répond-il.

Chercheur : Mario Beauregard
Centre de recherche, Institut de gériatrie de Montréal
Téléphone : (514) 340-3540, poste 4129
Financement : Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada